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Arsenal-Lens: "Quel était le but de Lee Dixon?", la cicatrice toujours ouverte de Tony Vairelles 25 ans après Wembley

Arsenal-Lens, ce mercredi (21h, sur RMC Sport) réveille chez Tony Vairelles (50 ans) de douloureux souvenirs 25 ans après son injuste expulsion à Wembley qui lui a causé beaucoup de tort, comme il le confie pour RMC Sport.

L’affiche entre Arsenal et Lens ce mercredi en Ligue des champions (21h, sur RMC Sport) ravive des souvenirs amvivalents chez Tony Vairelles. L’attaquant avait participé au moment d’histoire écrit les Sang et Or, le 25 novembre 1998: la première victoire d’un club français à Wembley (0-1) contre les Gunners alors entrainés par Arsène Wenger.

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Mais la soirée de rêve avait viré au cauchemar pour l’ancien international français (8 sélections, 1 but) exclu en toute fin de match après que Lee Dixon, défenseur d’Arsenal, avait simulé une agression de sa part. Vairelles avait manqué le dernier match à Kiev où les Lensois s’étaient inclinés (3-1) et avaient vu leur rêve d’un quart de finale contre le Real Madrid s’envoler. Trente-cinq ans plus tard, la douleur est encore vive chez Tony Vairelles pour qui cette injustice a eu un impact négatif sur sa arrière, comme il ele confie pour RMC Sport, où il endossera ses habits de consultant dans Rothen s’enfamme, ce mercredi (18h).

Tony Vairelles, quel souvenir gardez-vous personnellement de l’exploit de 1998?

Je ne peux pas en parler comme d’un bon souvenir. Tout était réuni pour que ce soit un bel évènement sauf qu’il a été entaché par une simulation qui me fait prendre un carton rouge à la dernière minute. J’avais marqué au match aller (1-1), peut-être qu’ils voulaient me faire expulser. Je peux comprendre que ce soit stratégique pour eux en début de match. Mais je n’arrive pas à comprendre qu’à la 89e minute, il fasse ce genre de simulation pour me faire expulser. Tout le match, j’ai bien senti qu’il y avait peut-être pas un contrat mais qu’on voulait me faire sortir de mes gonds.

"Je me suis dit qu’il faisait un malaise..."

Comment s’est passée cette action intervenue au milieu du terrain, loin du jeu et de l’arbitre central?

C’est ce qui me met hors de moi. Il y a une altercation en Cyril Rool et Ray Parlour, qui était hyper excité tout au long du match. Il mettait vraiment des coups méchants, il cherchait à aller au conflit à chaque fois. Là, c’était parti au conflit parce que Cyril ne s’était pas laissé faire et ils s’étaient frictionnés tous les deux sauf que l’arbitre (le Suédois Anders Frisk, NDLR) met carton rouge à Ray Parlour et carton jaune à Cyril Rool. Je regardais l’action et je sens quelqu’un dans mon dos venir me mettre un coup d’épaule, je me retourne et je vois le joueur tomber par terre et se tenir la tête, le ventre, la cheville… il ne savait pas où se tenir, il n’avait pris aucun coup. Je me suis dit qu’il faisait un malaise. Puis, j’ai vite compris qu’il simulait pour que je prenne un carton.

Martin Keown et Nigel Winterburn invectivent Tony Vairelles après la simulation de Lee Dixon lors d'Arsenal-Lens (0-1), le 25 novembre 1998
Martin Keown et Nigel Winterburn invectivent Tony Vairelles après la simulation de Lee Dixon lors d'Arsenal-Lens (0-1), le 25 novembre 1998 © ICON Sport

L’arbitre de champ, qui avait les yeux rivés sur une autre action, se retourne, vient vers nous et quand il voit tous les joueurs d’Arsenal courir sur moi comme si j’avais fait mal à leur coéquipier, ne cherche pas à comprendre, ne demande aucun conseil à ses arbitres-assistants et me sort un carton rouge. Je suis sur le cul et je me dis: ‘c’est pas possible de prendre un carton rouge alors que je n’ai rien fait et que tout le long du match, je me suis évertué à ne surtout pas répondre aux provocations’. J’ai en tête tout ce qui va en découler, je sais que c’est au minimum un match (de suspension), que le match prochain, c’est une potentielle qualification en quarts de finale de la Ligue des champions contre Kiev. Je vois tout ça défiler dans ma tête, je vois le tableau d’affichage et la 89e minute.

Vous aviez été suspendu un match…

Le plus dur dans tout ça, c’est qu’on fait appel, on nous laisse venir à l’UEA à Sion en Suisse, on nous laisse nous exprimer pendant plusieurs heures devant un parterre de traducteurs dans toutes les langues. Il y a 25 personnes et presque autant de traducteurs. Ils m’ont écouté parler de valeurs de foot et ce que je ressens sur cette injustice. Au final, ils nous ont fait patienter une heure avant de nous dire: ‘votre appel est irrecevable parce que vous n’avez pris qu’un match’. T’as envie d’éclater et de dire: ’vous vous foutez de ma gueule, vous auriez dû nous dire ça dès le début’. Comme il a été déclaré irrecevable, ils n’étaient pas obligés de regarder la vidéo. En Ligue des champions, les sanctions sont beaucoup plus dure alors, pourquoi on me met seulement un match? C’est parce qu’ils ont vu la vidéo et se sont rendus qu’il n’y avait rien. Ils ont vu les images et ne voulaient surtout pas que ça fasse jurisprudence en enlevant le carton, rouge. Ce qu’ils ont fait est vraiment hypocrite. Le président de la FIFpro avait appelé mon père parce qu’il trouvait ça injuste et il a dit: ‘l’arbitre, vu son erreur, va être puni’. Mais l’année d’après, il a fait la finale du championnat d’Europe (entre la France et l’Italie), c’est vraiment du foutage de gueule.

"Ma carrière aurait pu prendre une autre dimension"

Exclu Cazarre souhaite la bienvenue à Tony Vairelles !
Exclu Cazarre souhaite la bienvenue à Tony Vairelles !
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Comment s’étaient manifestées les provocations des joueurs d’Arsenal pendant le match?

Il y a une photo avec Martin Keown, stoppeur de l’époque. Après une action, on tombe par terre et je me retrouve sous lui façon romantique, baiser de cinéma (rires). Il me tire les cheveux quand je suis au sol l’air de dire: ‘tu restes à terre’. Si je fais un mauvais geste à ce moment-là, que je repousse avec les mains, que je lui mets un coup de poing, je suis expulsé. Je suis obligé de tirer sur ma tête pour montrer à l’arbitre ce qu’il fait. C’était ça tout le long. Parlour m’a mis des pointus dans les mollets ou me mettait des coups dans les tibias quand je faisais des protections de balle. Tu sentais que c’était malsain. On te tire les cheveux quand tu es par terre pour ne pas que tu te relèves. C’était des ‘tu restes là, tu ne vas pas nous emmerder.’ Quand je vois le geste de Lee Dixon à la fin, je me dis que c’est ce que les joueurs voulaient. Ils en voulaient peut-être à la terre entière puisque Ray Parlour se fait expulser juste avant moi parce qu’il avait eu un très mauvais geste. Ce qui est encore plus bizarre, c’est que je n’ai pas eu du tout de problème avec Lee Dixon pendant le match. Même au match aller, c’était un des mecs qui étaient le moins hargneux vis-à-vis de moi. Qu’il me fasse ça, ça m’a écœuré.

Steve Bould, capitaine d'Arsenal, attrape Tony Vairelles par le maillot après la simulation de Lee Dixon lors d'Arsenal-Lens (0-1), le 25 novembre 1998
Steve Bould, capitaine d'Arsenal, attrape Tony Vairelles par le maillot après la simulation de Lee Dixon lors d'Arsenal-Lens (0-1), le 25 novembre 1998 © ICON Sport

Ce match vous laisse-t-il des regrets éternels?

Frédéric Déhu à eu la même réflexion que moi: peut-être que si j’avais été là à Kiev, avec une autre organisation, il ne se serait peut-être pas fait expulser au bout de six minutes. A onze contre onze je ne suis pas sûr qu’on perde ce match même s’ils avaient une grosse équipe avec Shevchenko et Rebrov. A onze contre onze, on avait toutes nos chances de faire un autre match à Kiev et nos carrières à tous auraient peut-être été différentes. Shevchenko, c’est grâce à ce quart de finale contre le Real Madrid (le Dynamo s’était qualifié après un nul 1-1 et une victoire 3-1) qu’il part ensuite à l’AC Milan. Je n’ai pas à rougir de ma carrière mais elle aurait pu prendre une autre dimension si tu fais un quart de finale avec Lens contre le Real Madrid.

"Cette image de gentlemen anglais était tombée"

Avez-vous revu Lee Dixon depuis?

Certains journalistes ont essayé de le contacter puisqu’il est consultant aujourd’hui mais toutes les tentatives pour avoir son retour sur ce match ont été infructueuses, il n’a jamais voulu s’exprimer. Je trouve ça dommage. Quand tu fais une erreur, il faut savoir le reconnaître. J’aurais voulu savoir quel était le but, pourquoi avoir fait cette simulation à la fin du match? J’ai dû mal à comprendre. Heureusement qu’il y a les images. A l’époque, TF1 avait réussi à zoomer avec la loupe et on voit bien que c’est lui qui vient me tamponner. Je pense qu’il veut faire croire qu’en me tournant je lui ai mis un coup de coude. Peut-être qu’en me retournant, je l’ai touché avec ma main mais je n’ai jamais eu l’intention de mettre un coup de coude. Et il le sait mieux que personne. C’est pour ça que j’aimerais bien avoir son retour.

En avez-vous voulu à Arsène Wenger?

Ils étaient éliminés, ils n’avaient plus rien à gagner, ça aurait été hyper gentleman de dire: ‘oui mon joueur a déconné’. Il est français, c’est un club français qui passait, il aurait pu nous donner le petit coup de pouce vise à vis de l’UEFA. Si même l’équipe adverse avait été avec nous et nous donnait raison, ils (l’UEFA) n’auraient peut-être pas pu faire autrement qu’enlever ce carton rouge. Ça aurait été hyper gentleman de sa part mais ça n’a pas été fait. Peut-être qu’il n’y a pas pensé mais je ne lui en veux pas. Ce n’est pas une question de lui vouloir mais j’en ai parlé parce que ça m’a traversé l’esprit, je le reconnais.

Allez-vous regarder ce match Arsenal-Lens avec un sentiment de revanche ce mercredi?

Déjà, dès le match aller (rires). J’étais hyper content de les voir gagner contre Arsenal (2-1) même si les équipes ont changé. Ce qui est hyper dommage dans ce genre d’expérience… Moi qui étais admiratif du jeu anglais même si je préférais le football espagnol et italien à l’époque. Mais j’admirais le foot anglais parce que j’avais toujours l’impression que les Anglais étaient des gentlemen. Sur ce match et cette dernière action, je n’avais plus du tout envie d’aller jouer en Angleterre. Cette image de gentlemen anglais était tombée. J’ai entendu plein de bons retours sur des mecs comme Harry Kane. Gentleman ne veut pas dire que tu ne te bats pas mais tu dois être correct. J’aurais accepté de me faire rentrer dedans mais là, ce n’était plus du football, c’est truquer, tricher et c’est quelque chose que j’ai du mal à concevoir.

Nicolas Couet Journaliste RMC Sport