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Ça donne quoi, la saison 2 de Bielsa à Leeds avant Arsenal?

Actuel leader de Championship, Leeds aura droit à un petit avant-goût de Premier League ce lundi soir, avec un déplacement sur le terrain d’Arsenal en FA Cup (20h56). L’occasion de se pencher sur la situation du club du Yorkshire, à la moitié de la deuxième saison de l’ère Marcelo Bielsa. Spoiler: c’est toujours la folie à Elland Road.

Le premier acte avait été excitant, enthousiasmant, et à la fin… décevant. Pour sa première saison aux commandes de Leeds, Marcelo Bielsa avait failli réaliser en 2018-2019 un petit exploit, à savoir faire remonter les Peacocks en Premier League, quinze ans après leur descente aux enfers.

A la tête d’une équipe relativement médiocre, incapable de ne décrocher mieux qu’une septième place depuis son retour en Championship en 2010 (après un passage en troisième division), El Loco était parvenu à refaire vibrer Elland Road, et à jouer avec ses hommes le haut de tableau durant toute l’année, pour finalement finir troisième de la saison régulière. Mais alors qu’il était devenu, de fait, l’un des favoris des playoffs, le club du Yorkshire s’était fait sortir en demi-finale par le Derby County de Frank Lampard… Un coup pour rien, disaient les pragmatiques, si ce n’était pour confirmer la réputation de magnifique perdant (ou de non-gagnant, c’est selon) du technicien de Rosario.

Huit mois plus tard, Marcelo Bielsa est toujours sur le banc du LUFC, qui se déplacera ce lundi soir sur le terrain d’Arsenal en FA Cup. L’occasion pour Leeds de retrouver un petit peu la lumière des projecteurs, pour El Loco de croiser Mikel Arteta, fils spirituel de l’un de ses fils spirituels, Pep Guardiola, et pour nous de nous pencher sur la situation de l’actuel leader de Championship, plus que jamais candidat à la montée dans l’élite.

Une belle avance sur le troisième, mais l'hiver arrive...

C’est bien là la première information. Après 26 journées sur 46, Leeds est actuellement en tête de la deuxième division, ex-aequo avec West Brom. Surtout, les Whites, 52 points au compteur, possèdent actuellement neuf points d’avance sur le troisième, Brentford. Un détail très important, dans la mesure où seuls les deux premiers accèdent directement à la Premier League. C’est pourquoi El Loco devrait plus ou moins balancer la Cup, en faisant tourner ce lundi à l’Emirates.

Inarrêtable de début novembre à mi-décembre, avec sept victoires consécutives, Leeds a toutefois sérieusement ralenti la cadence depuis, en ne remportant qu’un seul de ses cinq derniers matchs. De quoi faire resurgir les souvenirs des hivers douloureux des équipes dirigées par l’Argentin, à l’image de l’OM 2014-2015. Le LUFC a en plus donné l’impression d’une équipe sur un fil, en témoignent son nul contre Cardiff (3-3) après avoir mené 3-0, ou sa victoire à l’arrachée à Birmingham (5-4), à la faveur d’un but à la 95e.

Une machine collective

Si le spectacle est au rendez-vous, c’est évidemment parce que Bielsa, fidèle à lui-même, n’a pas changé d’un iota son style. C’est valable en dehors des terrains, avec un coach n’hésitant pas à se pointer en survêtement au milieu des nœuds de papillon lors du gala des 100 ans du club, ou à reprendre de volée son interprète pour un terme traduit un peu trop approximativement après un match, et c’est évidemment valable sur le pré.

Comme l’an passé, comme à chaque fois ou presque qu’il est sur un banc, l’équipe de l’Argentin impressionne par ses courses, et par l’intensité mise dans l’effort collectif. Grâce à un énorme pressing et un marquage individuel à toute épreuve – avec une prise à deux régulière sur le porteur de balle – Leeds, deuxième meilleure défense du championnat, est acteur majeur de tous ses matchs (ce qui ne l’empêche pas de se faire punir). Et devinez quoi? Les supporters sont toujours sous le charme de leur dogmatique manager. C’est le LUFC qui affiche aussi la plus grosse possession moyenne (59,7%), c’est lui qui a le plus de tirs par match (16,1), et qui domine très largement le classement des fameux "Expected Goals". Dans un monde idéal, Leeds devrait ainsi compter douze points de plus si sa domination et ses occasions franches avaient été récompensées.

Dans le monde réel, celui de la deuxième division anglaise, les Whites n’ont même pas la meilleure attaque du championnat, dépassés par West Brom. "On est une équipe qui a besoin de beaucoup d’occasions pour marquer", regrettait récemment le technicien.

Basée sur de modestes individualités

Comment expliquer ce manque de réalisme? Avant tout par la qualité intrinsèque de l’effectif des Peacocks. Marcelo Bielsa avait des joueurs relativement limités à disposition la saison passée, et c’est encore le cas en 2019-2020, dans la mesure où Leeds a vendu durant l’été pour 30 millions d’euros d’éléments sans en recruter un seul – même si les arrivées en prêts de l’ailier Helder Costa (Wolverhampton) et du défenseur Ben White (Brighton) ont apporté.

Dans les différentes équipes-type de Championship régulièrement établies par les médias locaux, les noms de White et de Luke Ayling (un autre défenseur) sont ainsi les seuls à ressortir côté Leeds. Et au classement des buteurs, le meilleur scoreur maison Patrick Bamford (10 réalisations) n’est que huitième, à huit longueurs de Mitrovic (Fulham).

Autrement dit, Bielsa a encore réussi à transcender des footballeurs modestes, à leur faire prendre confiance en eux et à exploiter pleinement leur potentiel. "Ce qui est différent avec Bielsa? Ce qu'il tire de ses équipes, la manière dont il arrive à les faire se battre, courir, et ne jamais abandonner dans aucune circonstance, a salué Arteta avant leur duel. Il arrive à générer une croyance envers les joueurs, une demande, et c’est qui fait de lui un manager extrêmement performant. Quand vous parlez à des joueurs qui l'ont eu comme coach, les mots qu'ils ont pour lui sont toujours positifs. Ils sont devenus de meilleurs joueurs, de meilleures personnes, ils ont mieux compris leur profession à son contact."

Dans une interview à The Athletic, le capitaine Liam Cooper tentait lui aussi de mettre des mots sur le phénomène: "Avant Bielsa, on acceptait le fait d’être médiocres. Les supporters l’acceptaient. Aujourd’hui, on ne le supporterait plus."

Clément Chaillou