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Le hand arrêté: "Une décision tout à fait logique" pour Canayer, l'entraîneur de Montpellier

Entraîneur de Montpellier (4e), Patrice Canayer comprend l'arrêt définitif du championnat de France de handball à cause du coronavirus. Il reste confiant pour l'avenir des clubs et espère une place pour la prochaine Ligue des champions.

Patrice Canayer, la Ligue nationale de handball a annoncé la fin du championnat. Est-ce que c’était la décision la plus sage à prendre?

Je pense que le handball se grandit actuellement du fait de parler d’une seule et même voix. Je suis très heureux de ça. On a trouvé un consensus. On est resté solidaire dans une période où le repli sur les intérêts particuliers peut être fort. Cela fait maintenant trois ou quatre semaines qu’avec des groupes de travail, on envisage tous les scénarios d’un point vue sportif et économique. Et on se tenait prêt en fonction des décisions prises par le gouvernement. Si on nous avait dit, vous pouvez reprendre la compétition, on aurait repris l’activité. Là, on nous dit le 11 mai sortie du confinement mais respect des gestes barrières. C’est impossible pour nous de reprendre l’activité. C’est donc une décision tout à fait logique par rapport à la situation sanitaire telle qu'elle est aujourd’hui et telle qu'elle le sera vraisemblablement dans un mois ou un mois et demi.

Comment cet arrêt du championnat va-t-il impacter le club d’ici la fin de la saison?

Il y a une grande inquiétude dans l’économie en générale et dans le sport, en particulier le handball, on n’échappe pas à cela. Même si on est bien protégé par le chômage partiel, surtout que les salaires dans le handball ne sont pas des salaires excessifs, on sortira tous en négatif à la fin de l’année. Mais on arrivera à limiter les dégâts. Là où se pose de vraies questions et de vraies inquiétudes, c’est ce qui va se passer la saison prochaine. Aujourd’hui, on a très peu de lisibilité sur les recettes, les ressources externes, la billetterie. On ne sait pas quand on va pouvoir remettre du monde dans les salles, quand on va pouvoir remettre des salons réceptifs avec du VIP. C’est très compliqué d’aller démarcher les partenaires, les collectivités. On travaille avec le ministère pour trouver des solutions. On va être, comme la culture ou l’événementiel, très fortement impacté par cette crise. On va tout mettre en œuvre pour passer cette période difficile.

Des clubs de handball sont-ils menacés par cette crise?

Honnêtement, je ne le crois pas et je suis assez confiant dans les annonces qui ont été faites. Il a été dit de manière claire qu’aucune entreprise ne serait laissée au bord du chemin. Les entreprises sportives sont des entreprises. J’ai bon espoir que l’on trouve des solutions entre nous et avec le gouvernement pour avancer. Et puis, par nature, les sportifs ont l’habitude de se retrousser les manches et se battre. On va être dans une phase de récession mais de là à ce que cela tue l’activité dans le handball, je n’y crois pas trop.

Quelles sont les raisons qui vous poussent à être confiant?

Il y a deux points qui me laissent assez optimiste. On a la chance d’être dans un pays où la protection sociale existe et où elle est assez forte. L’activité des clubs est beaucoup moins impactée que les autres pays européens, on n’aura donc pas d’exode massif de joueurs. Montpellier-Paris, dans un an, ça sera toujours une belle affiche avec beaucoup de très bons joueurs. Et l’autre élément qui me rend optimiste, c’est que dans quatre ans, on aura les Jeux olympiques en France et le sport est un vecteur important de la dynamique. Paris 2024, ça peut être une belle perspective pour se donner un horizon.

Vous avez déclaré, il y a quelques jours, que les joueurs et l’entraînement vous manquent. Il va falloir prendre votre mal en patience encore quelques semaines?

J’ai un souci que me trotte dans la tête depuis quelques jours et qui me préoccupe énormément. J’espère que je vais les revoir le plus vite possible mais qu’est-ce que je vais pouvoir leur faire faire? Pour les salariés dans les bureaux, mettre un masque et respecter les gestes barrières, ça je vois comment on va faire. Mais par contre pour mes joueurs, je ne sais pas comment respecter les gestes barrières. Ma question: qui va prendre la décision de la date des reprises des entraînements physiques, en se rentrant dedans, en ayant des contacts? Est-ce que c’est le président de la République, le Premier ministre, le ministre de la Santé, la ministre des Sports, les présidents de clubs? En tout cas, moi, je n’ai pas envie de prendre cette décision (rires) et j’aimerais que d’autres personnes le fassent à ma place et donnent le feu vert pour la reprise de l’activité.

Pour finir, un petit mot sur le sport: quel avenir pour la ligue des champions? En étant qualifié pour la coupe d’Europe, vous allez candidater pour la deuxième place en Ligue des champions?

Alors là, c’est très, très compliqué. En championnat, on est tous d’accord. Le championnat s’est arrêté: Paris champion, les quatre suivants qualifiés pour la coupe d’Europe et pas de descente. On est dans le consensus, pas de souci. Là où c’est très difficile à admettre pour moi, pour les joueurs, pour le club, c’est sur la Ligue des champions, mais on fera bonne figure. On était qualifié en huitième avec une position favorable parce que l’on devait recevoir au match retour. Et selon toute vraisemblance, il n’y aura pas de huitième et de quart. On s’oriente vers un final four qui qualifiera les deux premiers de chaque poule et qui se jouera en décembre. Et là, on aura une perte de chance sportive car on ne pourra pas défendre notre chance. Dans notre dossier de candidature, on en parlera. Paris est champion et donc qualifié pour la prochaine Ligue des champions. Nantes, Nîmes, Toulouse et nous pouvons candidater pour la 2e place. On espère que l’EHF tiendra compte du fait que l’on a un manque de chance au niveau européen et qu’elle en tiendra compte par rapport au dossier que l’on va présenter pour jouer la Ligue des champions. Je trouve que ça serait assez légitime qu’elle tienne compte de ça. Ne pas jouer la Ligue des champions, quand tu es qualifié pour les huitièmes, c’est un préjudice important d’un point de vue sportif.

Julien Landry