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Rugby: comment le tournoi des VI Nations va s'ouvrir aux caméras de Netflix

Après la Formule 1, le tennis et le cyclisme, au tour du rugby d'être au cœur d'une future série sur Netflix. Les caméras de la plateforme américaine vont suivre les équipes du Tournoi des VI Nations à venir. L'Ovalie espère ainsi séduire de nouveaux publics à travers le monde. 

Elles sont aisément identifiables: leurs perches s'immiscent par-dessus les groupes de journalistes, leurs caméras dernier cri un peu en retrait. Ce lundi, à Londres, alors que sélectionneurs et capitaines des pays du VI Nations défilent devant la presse, plusieurs équipes de tournage de la future série Netflix sont présentes pour capter les à-côtés de ce grand barnum qui lance le Tournoi, à deux semaines des premiers matchs. 

Après "Drive to survive" sur la Formule 1, "Break Point" sur le tennis professionnel, et la série à venir sur le Tour de France tournée l'été dernier, le prestigieux tournoi va donc avoir les honneurs de la plateforme américaine. La société de production, Box to Box, est d'ailleurs la même que pour les séries précédemment citées. Le patron français du VI Nations, Benjamin Morel, ne dévoile pas quelle partie a contacté l'autre en premier, mais celui qui quittera ses fonctions cette année laisse un beau cadeau d'adieu: "Nous avons la volonté de promouvoir le rugby à l’échelle mondiale, car c’est un sport fantastique mais qui reste encore trop concentré sur certains pays", explique-t-il.

Une volonté de rajeunir le public

"Il faut l'ouvrir aussi à un public plus jeune et cela passe par des initiatives comme celles-ci qui célèbrent les héros du rugby, sans influencer leur préparation", a ajouté Morel. Le fonds d'investissement CVC, qui possède près de 15% du capital du tournoi des VI Nations depuis 2021 espère notamment développer ainsi les revenus de la compétition. 

Car si l'édition 2023 du tournoi des VI Nations regorge d'intérêt, avec l'Angleterre et le pays de Galles qui chercheront à se relancer après un changement de sélectionneurs cet hiver, et un tenant du titre en quête d'un inédit double Grand Chelem, sans oublier la perspective de la Coupe du monde en fin d'année, il a fallu convaincre les différentes fédérations d'ouvrir leurs coulisses. "Ils ont bien choisi leur moment pour le faire, glisse dans un sourire le capitaine anglais Owen Farrell. C’est une année énorme qui s'annonce, avec probablement le Tournoi le plus relevé et le plus disputé depuis des années, donc je crois que le public a hâte de voir comment cela se passe de l’intérieur".

Mais un sélectionneur comme Warren Gatland, qui fait son retour à la tête du pays de Galles, le concède: "Je suis un peu partagé: c’est positif pour le rugby bien sûr, mais dans ma position, avoir des caméras autour de nous au quotidien n’est pas la partie la plus facile du métier, quand les journalistes cherchent des angles et des histoires à raconter." 

Toto Wolff et George Russell ont partagé leur expérience

Le staff des Bleus de son côté n'était pas des plus enthousiaste, nous glisse-t-on. Mais un échange a eu lieu avec Netflix et le service communication de la FFR en amont, notamment pour définir les personnages à suivre. Les tournages ont commencé. Par exemple au centre d'entraînement du Racing 92, au Plessis-Robinson, où une équipe a suivi Gaël Fickou récemment. 

Pour convaincre, Benjamin Morel confirme que Toto Wolff, le directeur de l'écurie Mercedes, et son pilote George Russell ont participé à un briefing avec les responsables des six fédérations de rugby: "Nous devions comprendre comment un tournage comme celui-ci fonctionne en pratique. Ils ont partagé leur expérience de manière très transparente et même si le rugby a ses spécificités, c'était enrichissant". 

Une de ses spécificités étant son aspect collectif. Or les séries de ce genre aiment suivre quelques personnages principaux pour dérouler le scénario d'une compétition autour d'eux. "Il est vrai que ce n'est pas dans la tradition du rugby, mais chacun comprend la nécessité de se mettre en avant. Mais au-delà des histoires personnelles, ce qui va rendre la chose intéressante, c’est de comparer les styles de préparation, les cultures différentes dans chaque équipe", rassure Benjamin Morel. "On est dans le non-scripté et on verra les histoires que le Tournoi va nous apporter. Il y a beaucoup de flexibilité selon l’évolution du tournoi."

Les Bleus n'ont pas été briefés encore

D'après nos informations, l'Ecossais du Racing 92, Finn Russell, a également été suivi par les caméras de Netflix la semaine dernière. Les joueurs ont bien conscience de l'impact sur l'image de leur sport d'un tel projet, mais attendent aussi de voir comment se passe le tournage, le capitaine des Bleus en tête: "Nous n'avons pas été briefé pour le moment, je pense que cela va arriver dans la semaine", précise Antoine Dupont, alors que ses coéquipiers du XV de France se rassemblent depuis dimanche à Capbreton, dans les Landes, où une équipe de production sera présente.

Les images tournées par les caméras de la Fédération française de rugby seront également exploitées dans la série. "Partager avec les fans ce qui se passe à l’intérieur, c’est ce qui nous plait nous aussi quand on regarde les séries à propos d’autres sports. Après il va falloir trouver le bon équilibre entre l’intimité d’un groupe et les moments de partage", ajoute le demi de mêlée français. Le capitaine irlandais Jonathan Sexton a une autre préoccupation: "Avec les équipes de tournage dans notre environnement, cela peut être plus difficile de garder des secrets pour nos adversaires", dit-il avec le sourire. "Mais j’espère que nous pourrons nouer une bonne relation avec les équipes de tournage, pour donner un bon rendu". Et ne pas pâlir en comparaison des autres sports qui se sont exposés ainsi. 

Kevin Morand