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Une nuit avec les coureurs de l’Ultra Trail du Mont-Blanc

Souffrance, problèmes de matériel, fatigue… Immersion avec les sportifs amateurs et professionnels de cette 19ème édition.

Après vingt kilomètres de course, dans la nuit, les coureurs armés de bâtons, de lampes frontales, arrivent à Saint-Gervais. Un des premiers points de ravitaillement. "De l’eau?", scande les bénévoles. Madeleine est chargée, pour la troisième année, de remplir les gourdes des sportifs. "Ils sont biens. Ils ont soif, ils ont chauds. Ils sont bien revigorés". Des dizaines de bénévoles s’activent pour donner au plus vite à boire et à manger. Du fromage, du saucisson, des bananes... les coureurs, le visage luisant, se pressent pour en avoir. "Ça fait du bien", lâche l’un d’eux. C’est encore le début de la course et "les jambes vont bien, la tête va bien, pour le moment", sourit ce même traileur. Au bord des routes, les spectateurs venus en nombre se cassent la voix. Théo et Jean-Baptiste scandent un à un les prénoms de chacun des traileurs. "Ils font tous la même course donc ils ont tous le droit à leur petit prénom. On essaye de soutenir tout le monde. Tu sens que ça les revigore et que ça peut les motiver un peu". Tous passent sous les "Olé" du public. Puis d’autres connaissent déjà des mésaventures. Problème de matériel pour Guillaume qui fait son premier UTMB: "j’ai cassé un bâton. J’en ai plus qu’un. Je n’ai vraiment pas de chance". Heureusement, l’un de ses amis l’attend au prochain point de ravitaillement aux contamines montjoies pour lui en ramener des tout neuf.

L’important soutien des proches

Déjà six heures d’efforts physiques pour ces amateurs assis, en train de manger, de se changer aux Contamines Montjoie. Yann change de t-shirt: "pour l’instant ça va, je n’ai pas de soucis particulier. Juste un peu de fatigue mais je pense que c’est normal". Certains justement dorment sur les bancs. Les points de ravitaillement sont vraiment les lieux de regain d’énergie. De part les collations, mais aussi et surtout, le soutien des proches. Stéphane qui fait son premier UTMB peut compter sur Bernard. Il est venu avec un gros sac rempli de vêtements. "Je l’aide et lui donne de l’énergie pour qu’il passe la ligne d’arrivée parce que c’est le plus important". Même les bénévoles se donnent à cœur joie d’encourager les athlètes tout en les servant. Joël fait ça depuis quinze ans: "moi je coupe des oranges, je prépare la bouffe", rigole cet habitué. D’autres ont même fait du chemin pour chouchouter les coureurs. Julie vient de Dijon exprès pour l'événement. L’ultra trail est une vraie passion dans la famille. Ce soir, elle est chargée de remplir les verres de coca et d’eau gazeuse. "C’est une expérience extraordinaire, c’est sympa. Il y a une vraie proximité avec les sportifs", détaille cette mère de deux enfants. A cette étape de la course, au bout de trente et un kilomètres, les corps commencent à fatiguer. Philippe le médecin du poste de secours le constate: "On a quelques abandons mais peu. Ce sont surtout des coureurs qui ont mal aux articulations, qui ont des plaies parce qu’ils sont tombés, quelques troubles digestifs." Pour autant, la course est encore longue. Il faut maintenant prendre la direction de Courmayeur, en Italie.

Les élites toujours plus rapides

Nouveau point d’étape, à mi-course. 80 kilomètres avalés. La salle des sports de Courmayeur n’attend plus que les premiers traileurs. L’américain Jim Walmsley est le premier à y arriver. Suivi de près par la légende de l’ultra trail, l’Espagnol Kilian Jornet. Eux, à la différence des amateurs, ne se font pas servir par des bénévoles. Mais une personne, souvent un membre de leur famille, l’attend à une table. Où elle disposait de la nourriture, sucrée, salée, des boissons énergisantes. De quoi redonner de la force à son poulain. C’est un passage crucial où la tête de la course ne veut perdre aucune seconde. Tout est millimétré, chronométré. Ces gars sont des extra-terrestres de leur discipline. Ils avalent les kilomètres à une vitesse folle. Et pour les suiveurs, en voiture, il n’y a pas de temps à perdre entre chaque point de ravitaillement. Il faut vite se dépêcher d’être au prochain pour ne pas louper ces monstres. Au petit matin, levé de soleil en Suisse. Le dernier tiers de la course est entamé. A Champex, dans le canton du Valais, Marianne Hogan, la première femme du parcours, se pose quelques intants auprès de son frère François. "Je passe une bonne journée", lâche la Canadienne, la bouche pleine. A peine le sandwich avalé, elle repart. Retour en France. Avec l’espoir de remporter son premier Ultra Trail du Mont-Blanc.

Par Lena Marjak