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Roland-Garros: "Noah ? Quelqu'un qui s'amusait quand il jouait", se souvient Bernard Hinault

Bernard Hinault fait partie de cette génération dorée des années 80 avec Yannick Noah, Alain Prost, Michel Platini, Jean-François Lamour et d’autres. Comme le vainqueur de Roland-Garros 1983, lui aussi attend un successeur français au palmarès du Tour de France. Il jette son regard sur le tennisman et cette époque radieuse pour le sport français.

Bernard Hinault, vous souvenez-vous de la finale de Yannick Noah en 1983?
C’était à quelle date exactement (le 5 juin, ndlr) ? Peut-être que j’étais au Critérium du Dauphiné (il était forfait). On n’avait pas eu ça depuis très longtemps. Ce n’était pas commun. J’étais à écouter comme tout le monde je pense, surtout en ayant su qu’il était en finale. Quand on est un sportif de haut-niveau on s’intéresse aussi aux autres. On n’est pas tout seul. C’est à peu près la même génération que moi. Je regardais les autres compétiteurs.

Les années 80 étaient fantastiques pour le sport français avec vous, Noah, Alain Prost, Michel Platini, Jean-François Lamour…
Il y avait aussi le rugby avec Jean-Pierre Rives. C’est une période faste qu’on a vécu, c’était bien. Il y a toujours eu de bonnes périodes. Mais là c’était vraiment particulier. Cela faisait longtemps que l’on n’avait pas eu autant de champions français en même temps. D’un seul coup, dans différents sports, on avait des compétiteurs à la hauteur à l’échelon mondial.

"Quelqu’un qui s’amusait quand il jouait"

Vous voyez une explication à cette période heureuse ?
Il n’y a pas d’explication. C’est toute cette génération qui est arrivée au même moment comme on peut avoir des athlètes qui dominent pour plusieurs années. C’est le cas de Teddy Riner qui est encore bien présent. Après on peut avoir un trou comme dans le cyclisme français actuellement. On n’a pas le champion qui sort des normes.

Quel regard portiez-vous sur Yannick Noah. Peut-être que vous jouiez au tennis pour le plaisir ?
Je n’ai jamais joué au tennis. C’était quelqu’un qui s’amusait quand il jouait. C’est l’idée qu’il faut en garder. On avait l’impression que quand il jouait au tennis c’était du jeu et pas un métier.

C’était aussi un garçon qui aimait la fête.
On peut être fêtard à partir du moment où l’on gagne. Dans ce cas-là, on a le droit.

Vous ne vous compariez pas avec les autres champions d’autres sports ? Leur façon de faire ?
Faut pas comparer. Chacun fait ce qu’il entend. Moi je ne pouvais pas me permettre sur une compétition comme le Tour de France qui dure 23 jours de faire la fête. Je ne pense pas que pendant Roland-Garros il se permettait de faire la fête. Il le faisait peut-être avant ou après. Pendant les 15 jours de compétition ça devait être très serré.

De vos échanges avec Yannick Noah, que retenez-vous ?
Il avait toujours cette idée de faire la fête. Il est né comme ça, c’est tout.

Derrière, il a aussi connu le succès dans la chanson.
Quand on est un athlète on ne pense pas à ça. On ne pense pas si on sera reconnu à un moment. Il a été capitaine de l’équipe de France de la coupe Davis. On l’a vu danser et c’était le début de la fête.

La France a aussi beaucoup changé dans les années 80 avec l’arrivée de la gauche au pouvoir.Quand on est un athlète, ça ne nous concerne pas trop. On pense au sport et pas au reste. La seule chose pour laquelle on est inquiété, c’est quand on vous prend vos impôts.

Morgan Maury