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Voile: qu'est-ce que l'Arkéa Ultim Challenge, cette nouvelle course autour du monde qui s'élance dimanche?

Thomas Coville

Thomas Coville - AFP

Ce dimanche, à 13h30 se tiendra à Brest le départ de l’Arkea Ultim Challenge. Cette compétition autour du monde en multicoque est une première dans l’histoire de la course au large à la voile.

Six skippers s’élanceront pour un défi inconnu: réussir en "mode course" là où seulement sept marins ont déjà réussi en "mode record" à tourner autour du monde en multicoque et en solitaire: Alain Colas, Olivier de Kersauson, Philippe Monnet, Ellen Mac Arthur, Francis Joyon, Thomas Coville et le plus rapide François Gabart en 42 jours et 16 heures.

Anthony Marchand (Actual Ultim 3), Armel Le Cléac’h (Maxi Banque Populaire XI), Charles Caudrelier (Maxi Edmond de Rothschild), Tom Laperche (Trimaran SVR-Lazartigue) et Éric Péron (ULTIM ADAGIO) vont donc tenter de rejoindre ces grands noms de la course au large. Le sixième homme, Thomas Coville (Sodebo Ultim 3), connaît déjà l’exercice et se souvient de l’état dans lequel on revient après une circumnavigation sur trois flotteurs.

"Tu vois ce que c'est qu'un bois flotté ? Ce bois tout blanc qui est arrivé de la mer et qui s'est fait laminer et user, que la mer a rejeté et qui a dit “voilà il reste ça”. Eh bien quand tu arrives d'un tour du monde en solitaire en multicoque tu es un bois flotté. Tu es réduit à ça. Et à la fois, c'est tellement pur, c'est tellement simple, on est tous tombé en extase. C'est une vraie œuvre d'art, un bois flotté. Je pense que François (Gabart), Ellen (Mac Arthur), Francis (Joyon)... Quand on est arrivé nous étions des bois flottés." Un exercice dont on met beaucoup de temps à se remettre mais que Thomas Coville a tenté huit fois dont cinq en solitaire.

Pas tout à fait comme les pionniers du Vendée Globe en 1989

Cette nouvelle course qui a été évoquée pour la première fois en 2006 a mis plus de quinze ans avant de voir le jour afin d’être certain que ces multicoques étaient capables sans tous casser de faire ensemble le tour de la terre. Ce dimanche, à Brest, les six marins feront donc figure de pionniers mais, d’après Charles Caudrelier, pas tout à fait comme ceux partis en 1989 pour le premier Vendée Gobe.

"A l'époque je crois qu'ils ne savaient vraiment pas où ils allaient et c'étaient des grands aventuriers. Nous on connaît mieux la route, on l'a déjà faite plein de fois avec plein de types de bateaux. Ces bateaux-là, en mode volant, ne l’ont pas fait mais des bateaux de cette taille là l'ont fait. On sait à peu près comment ça se passe mais par contre n'importe quel concurrent au départ du Vendée Globe ou de cette course-là va vivre une aventure personnelle incroyable et je sais que je ne serai pas le même homme à l'arrivée. J’en suis convaincu."

Skippers expérimentés et jeunes loups

Malgré son long palmarès, Charles Caudrelier, vainqueur de la dernière Route du Rhum, ne connaît pas l’expérience d’un tour du monde en solitaire à l’inverse de Thomas Coville ou d’Armel Le Cléac’h l’autre grand favori de cette course, trois fois sur le podium du Vendée Globe pour trois participations et surtout vainqueur en 2017. Le breton sait pourtant que l’exercice qui se présente devant lui est d’un autre niveau.

"Clairement je sais que la montagne à gravir est encore plus haute que ce que j'ai pu faire sur le Vendée Globe. Et c'est aussi pour ça que ça me plaît de partir sur ce tour du monde parce que j'ai eu la chance de faire trois fois le Vendée Globe et là je m'attaque à une autre grosse montagne, plus haute, mais c’est ce qui est passionnant." Thomas Coville sait qu’il faudra surveiller le skipper de Banque Populaire comme le lait sur le feu : "C'est un concurrent redoutable parce qu’il sait très intelligemment gérer chacune de ses courses différemment. Il s'est autoproclamé "le chacal" il y a très longtemps, dans cette dimension d'être capable d'être à l'affût et d'aller jusqu'au bout pour passer la ligne en premier."

Ces trois skippers très expérimentés auront face à eux trois jeunes loups: Tom Laperche, qui succède à François Gabart à la barre du trimaran SVR-Lazartigue, Anthony Marchand et Éric Péron.

“Une course avec soi-même avant d'être une course avec les autres”

Pour les six hommes il faudra savoir, en "mode course", trouver le bon équilibre entre efficacité et sécurité car à la différence des monocoques, les multicoques laissent toujours planer au-dessus de la tête du skipper la menace du chavirage. "Ces bateaux-là qui sont très exigeants vont très vite, rappelle Charles Caudrelier. La haute vitesse pendant 45 jours je n'ai jamais fait. Quand on navigue sur un bateau multicoque on a toujours ce stress du chavirage qui nous empêche parfois de dormir et qui nous épuise. Du coup c'est un énorme challenge. Et je crois que ça va être une course avec soi-même avant d'être une course avec les autres."

A la différence du Vendée Globe qui se déroule sans assistance et sans escale, les skippers auront droit à des arrêts techniques en cas de soucis. Mais ils devront respecter un temps d’arrêt de 24 heures minimum pour chaque escale utilisée. La course devrait durer 45 jours environ et le vainqueur empochera 200.000 euros.

Pierre-Yves Leroux