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Foot pro, businessman, bête de cage: qui est Roman Dolidze, l'adversaire de Nassourdine Imavov?

Numéro 8 du classement des challengers des -84 kilos, Roman Dolidze offre un défi de taille au combattant français Nassourdine Imavov, qui l’affronte ce week-end à Las Vegas dans le combat principal d’une UFC Fight Night (en direct à partir de 1h dans la nuit de samedi à dimanche sur RMC Sport 2). Portrait du Géorgien au parcours atypique qui a commencé le MMA à 28 ans seulement.

Une séquence qui touche au sublime. Et qui a de quoi effrayer la concurrence. Jack Hermansson n’oubliera jamais ce que Roman Dolidze lui a fait endurer lors de leur combat de décembre 2022 à l’UFC. Coincé dans un superbe calf slicer (prise de compression du mollet) initié dos au sol, incapable de sortir du piège refermé sur sa jambe, le combattant suédois ne peut que subir les coups de poing de son adversaire géorgien avant de voir l’arbitre mettre fin au massacre. Un TKO en forme d’avertissement.

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Numéro 8 du classement des challengers de la catégorie des -84 kilos, Roman Dolidze est un homme dangereux dans la cage. Très dangereux. Qui offre un défi de taille à Nassourdine Imavov, son adversaire français ce week-end à l’Apex de Las Vegas dans le combat principal d’une UFC Fight Night. A 35 ans, et après une défaite – même si elle fait clairement débat – face à son premier top 5 (Marvin Vettori) lors de son dernier combat en date en mars dernier, "The Caucasian" n’a pas le choix: il doit s’imposer pour garder vivant son rêve de ceinture UFC.

Un Graal qui récompenserait un parcours atypique où le MMA fait son apparition sur le tard. Père ingénieur, mère médecin, Roman Dolidze grandit dans sa ville de naissance, Batumi, sur les bords de la mer Noire, dans ce qui deviendra la Géorgie trois ans après sa venue au monde. Et où les conséquences de la chute de l’Union soviétique se ressentent. "On a connu des années difficiles, se souvient-t-il dans une interview à RMC Sport. Pas de lumière, pas de gaz, pas de nourriture, rien."

"Parfois, on n’avait pas d’eau, complète-t-il dans un entretien au Jenna Ben Show. On ne pouvait pas aller au magasin pour acheter du pain. Il fallait avoir un ticket pour s’approvisionner. Et parfois, c’était juste un demi-pain. C’était difficile pour tout le monde. Mais je n’y pensais pas. Pour moi, c’était la vie normale." Forgée dans les obstacles mais pas sans bonheur. "J’étais quand même heureux. Ces difficultés ont fait de moi qui je suis. Je n’ai aucun regret." Ses parents ont "toujours voulu qu’(il) fasse du sport". Mais "l’éducation a toujours été plus importante".

Passé par une école confessionnelle pendant sept ans, où il hérite d’un deuxième prénom (George), puis par une école militaire, Dolidze va étudier l’ingénierie en construction navale et le management d’entreprise en Ukraine. Un cursus qui lui sert encore aujourd’hui. "Les carrières sont courtes dans le sport. Il y a une vie après. Tout le monde ne peut pas atteindre le très haut niveau. Beaucoup ne gagnent pas assez pour assurer l’avenir de leur famille. Mes études m’ont beaucoup aidé dans mon développement personnel. Aujourd’hui, j’ai une chaîne d’épiceries. On en ouvre un peu partout. On se développe et on a de grands projets."

En parallèle, il y a le sport. Le football, d’abord. "J’ai été gardien de but pendant huit ans. Les trois dernières années, j’ai joué professionnellement en Turquie, même si ce n’était pas au très haut niveau." La bascule va s’opérer à 22 ans. Dolidze découvre le grappling. "En six mois, j’étais champion d’Ukraine. Puis j’ai été champion d’Europe et du monde." Le Géorgien remporte les qualifications Asie et Océanie (les plus faciles selon les spécialistes) de l’ADCC, la plus prestigieuse compétition de grappling, mais sortira au premier tour du tournoi final.

Une nouvelle bascule arrive à 28 ans, l’âge que Nassourdine Imaov aura en mars. Direction le MMA, où il débute en pro sur le circuit ukrainien en décembre 2016… chez les lourds. "On m’a offert un gros contrat pour signer en MMA. Pour mon premier combat, je n’avais aucune base en pieds-poings, c’était horrible! Le combat commence à peine, j’envoie une combinaison one-two et il tombe. Je ne comprenais rien à ce qu’il se passait. J’ai enchaîné en lutte et je l’ai soumis." Passé en mi-lourds dès son deuxième combat remporté face au Français Rémi Delcampe, il enchaîne cinq victoires en deux ans dans une organisation locale, le WWFC (World Warriors Fight Championship), où il prend puis défend la ceinture des -93 kilos.

Suffisant pour convaincre l’UFC, qui le signe alors qu’il vient d’entamer la trentaine. "Tout est allé très vite", savoure-t-il aujourd’hui. Ses débuts dans la plus grande organisation de MMA sont retardés suite à une suspension d’un an pour contrôle antidopage positif. Ils ont lieu en juillet 2020, à Abu Dhabi, où l’UFC s’installe pendant la pandémie, pour une entrée signée d’un TKO sur Khadis Ibragimov (le combat devait avoir lieu au Kazakhstan avant de devoir être déplacé en raison de la situation sanitaire) après un superbe coup de genou. Après une victoire par décision partagée sur John Allan, Dolidze entame son parcours chez les -84 kilos en remplaçant Dricus du Plessis pour prendre Trevin Gilles. Qui lui inflige sa première défaite en carrière sur décision unanime. Quatre victoires dont trois "performances de la soirée" suivent, la dernière face à Hermansson, et lui permettent d’intégrer le top 10 de la catégorie avant son deuxième accroc sur la route face à Vettori.

La suite passe par Nassourdine Imavov pour son premier main event (combat principal) à l’UFC, un choc que les deux ne peuvent pas perdre s’ils veulent garder leurs ambitions intactes. Et gare au danger pour le "Sniper" français. Il y a son sol de haut niveau, bien sûr, avec notamment sa maîtrise de la garde fermée et cette capacité peu fréquente en MMA à être très dangereux sur son dos où il est capable d’attaquer en permanence et d’inverser la tendance d’un combat à tout moment, mais aussi cette foudre dans les poings qui compense un striking à la technique rudimentaire. "Je n’imaginais pas avoir cette puissance en moi, en sourit-il. On ressent ça comme une force sauvage. C’est notre instinct animal qui s’exprime."

Nouveau coach de Nassourdine Imavov, Nicolas Ott résume la chose en une image: 'Il peut assommer un cheval avec sa droite ou sa gauche. Et il a un jeu de soumissions en chaîne à partir du sol qui est fantastique." "Il ne faut pas lui laisser une opportunité sinon il va soumettre, poursuit Daniel Woirin, le coach de Benoît Saint Denis, qui a entraîné Serghei Spivac (membre du top 10 des lourds de l’UFC battu par Ciryl Gane en septembre dernier à Paris) et lui en France il y a quelques années. Nassourdine doit faire attention à ne pas se jeter. Il peut être contré et se retrouver dos au sol face à Dolidze peut être compliqué. Et si Nassourdine rentre dans une guerre avec lui, ça peut aussi être compliqué car l’autre tape fort. Nassourdine est moins puissant."

Seul revers de la médaille et donc défaut? Cette tendance souvent vue chez les spécialistes du grappling à se découvrir un amour pour le striking, et à ne pas le lâcher, après quelques KO. Partenaire d’entraînement de Sean Strickland et Chris Curtis chez Xtreme Couture à Las Vegas, Roman Dolidze (12-2 en carrière) pourra prendre des conseils stratégiques auprès des deux derniers adversaires en date du Français. Qui ne doutent pas de sa capacité à faire respecter la hiérarchie du classement (Imavov est onzième).

"Roman est le dernier mec avec qui je veux me tester en jiu-jitsu brésilien, détaille Strickland, ancien champion de la catégorie détrôné en janvier par Dricus du Plessis. C’est un monstre. S’il doit perdre, c’est que vous lui aurez fait la guerre du début à la fin. Il est explosif, bizarre dans son style. C’est un putain de méchant, le genre de mec qui vient te planter quand tu dors! Quand on s’entraîne ensemble, c’est une guerre. On ne sparre pas beaucoup car à chaque fois, l’un essaie d’assassiner l’autre. Ça va être un gros combat. J’ai hâte de voir ça et j’ai confiance en lui."

L’intéressé aussi. "Si je fais quelque chose, je veux toujours être le meilleur. Quand je jouais au foot, j’essayais d’être le meilleur gardien de but au monde. (…) J’entre dans la cage pour accomplir mon destin. Je ne recule devant personne. Je veux juste être le meilleur!" Sans se soucier de qui il doit écraser au passage. "Le combat me rend cruel. Je prends qui vous voulez, quand vous voulez. Je suis sans pitié." Nassourdine Imavov est prévenu. Et Jack Hermansson peut confirmer.

https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport