RMC Sport

Coupe Davis: Djokovic a-t-il refusé un contrôle antidopage? Les explications d'un spécialiste français

Novak Djokovic s’est retrouvé au coeur d’une polémique lors de la Coupe Davis en refusant de fournir un échantillon d’urine lors d’un contrôle antidopage avant son match contre Cameron Norrie. Au micro de RMC Sport, Rémi Wallard, membre de l’Agence française de lutte antidopage, explique pourquoi le Serbe n’a pas, en réalité, boycotté ce contrôle.

La présence de Novak Djokovic pour la phase finale de la Coupe Davis n’aura pas suffi. Malgré le numéro 1 mondial, la Serbie s’est fait sortir dès les demi-finales par l’Italie d’un Jannick Sinner en grande forme et future vainqueure de la compétition.

Outre la défaite aux portes de la finale, le Serbe a aussi exprimé sa colère en conférence de presse jeudi en révélant avoir refusé un contrôle antidopage en amont de sa victoire contre Cameron Norrie (6-4, 6-4) lors du quart de finale contre la Grande-Bretagne. Malgré la vive polémique née de ces propos, Novak Djokovic ne s'est pourtant pas soustrait au test selon les explications de Rémi Wallard, directeur adjoint du département des contrôles au sein de l’Agence française de lutte antidopage (AFLD).

Un contrôle inhabituel qui a surpris Djokovic

En principe, Novak Djokovic n’aurait pas dû être surpris d’un potentiel contrôle inopiné avant d’affronter Cameron Norrie puisque les organisateurs de la Coupe Davis avaient signalé cette possibilité aux capitaines des sélections engagées.

"Normalement les standards sont assez clairs pour ne pas gêner la préparation mentale du sportif. Et en tennis c’est encore plus important parce que c’est quand même un un-contre-un sur un court. Pour ne pas gêner la préparation du sportif en compétition c’est quand même mieux à l’issue de la compétition. Nous c’est ce que nous faisons à l’AFLD", a ainsi expliqué Rémi Wallard lors de son passage dans le podcast RMC Sport Court N°1.

Avant d'ajouter: "Maintenant je ne suis pas là pour commenter ce que la Fédération internationale a voulu mettre en place pour, a priori, faciliter la vie du sportif. J’ai cru lire que c’était pour leur laisser du temps après le match et rentrer plus vite à l’hôtel. C’était à mon avis pour essayer d’arranger le sportif. On voit bien que créer une règle autour d’une règle existante, cela crée de la confusion. C’est malheureux, pour le tennis et Novak Djokovic, et surtout pour la lutte antidopage."

Episode 155 : Dopage – pourquoi l’affaire Djokovic a enflammé le tennis mondial ? avec Remi Wallard, de l’Agence Française de lutte Antidopage
Episode 155 : Dopage – pourquoi l’affaire Djokovic a enflammé le tennis mondial ? avec Remi Wallard, de l’Agence Française de lutte Antidopage
36:26

Djokovic a fourni un test urinaire "quand il a pu"

En partageant sa frustration après sa victoire contre le Britannique, Novak Djokovic a lui-même ouvert la porte aux critiques. Pourtant, le Serbe s'est trompé en assurant avoir refusé un contrôle antidopage puisqu'il aurait bien entamé la procédure de test avant de défier Cameron Norrie et a été suivi pendant toute la journée par un agent testeur de la lutte antidopage.

"C’est pour ça qu’il n’a pas refusé le test. C’est juste qu’il a été notifié, encore une fois je ne jugerai pas, il a été notifié une heure et demie voire deux heures avant sa rencontre. Il n’a pas refusé le contrôle, il a signé sa notification et je crois même qu’il a refusé l’analyse sanguine et il a attendu pour le test urinaire simplement parce qu’il voulait se préparer et qu’il n’avait peut-être pas envie d’uriner", a enchaîné Rémi Wallard.

"Ce n’est pas un problème, une fois que la notification est signée par un sportif il y a une escorte antidopage qui l’accompagne partout pour le garder à vue et s’il a envie d’uriner, il sera accompagné pour effectuer le contrôle. Il n’a pas refusé le contrôle et a juste été notifié avant le match. Et comme il voulait se préparer mentalement et préparer son match, ce qu’on peut comprendre, il a souhaité faire le test… quand il a pu en fait. Parce qu’un sportif n’urine pas sur demande mais le fait quand il peut. Tout simplement."

Le membre de l'AFLD d'insister: "Il n’a pas refusé, je me permets de le dire parce que voilà… c’est Novak Djokovic. Peut-être le meilleur joueur de l’histoire du tennis pour certains donc tout de suite cela fait les gros titres. En aucun cas il n’a refusé le test, il a juste voulu donner l’urine quand il a pu la donner et il a sûrement, à 100%, été accompagné par une escorte antidopage tout le long de cette procédure. Pendant le match il était à la vue de tout le monde. Et puis il n’y a presque pas de débat. C’est juste qu’il est offusqué du fait d’avoir été contrôlé avant un match et que cela l’a juste perturbé dans sa préparation."

"Une très mauvaise pub pour la lutte antidopage"

Dimanche lors de l'émission les Grandes Gueules du Sport sur RMC, Marc Madiot s'est opposé à Marion Bartoli sur cet imbroglio autour de Novak Djokovic. Le patron de l’équipe cycliste Groupama-FDJ a réclamé des sanctions contre le Serbe en avançant la possibilité de cacher certains produits dopants sur la durée de son match. Une hypothèse assez peu crédible selon le directeur adjoint du département des contrôles au sein de l'AFLD.

"Sauf manipulation tierce comme le faisait un peu Lance Armstrong à l’époque, je n’en sais rien. Maintenant, s’il a été escorté tout au long de la procédure par un agent antidopage, je ne vois pas ce qui pourrait disparaître en si peu de temps. Je n’ai pas plus de réaction à apporter. Je peux comprendre Monsieur Madiot, encore une fois le cyclisme a tellement payé cher le lourd passif en termes de dopage qu’il est très remonté sur ce genre de réactions. Et c’est vrai que c’est encore une fois une très mauvaise pub pour la lutte antidopage."

Et Rémi Wallard de conclure: "Ce qu’il s’est passé, sans faire de jugement de valeur sur ce que la Fédération internationale de tennis a voulu mettre en place pour faciliter la vie du sportif, cela ne fait jamais plaisir quand il y a un sujet avec le meilleur tennisman de tous les temps sur ce thème, malheureusement."

Jean-Guy Lebreton avec le podcast Court N°1