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Euro volley: génial Grebennikov, tout sauf un joueur de l'ombre

Depuis 2015, la France possède sans doute le meilleur libéro au monde: Jenia Grebennikov. Interdit d’attaquer, il éclaire pourtant ce poste ingrat par ses défenses spectaculaires et son sourire.

"Qu’est-ce que c’était bien, mais trop court!", rigole Jenia Grebennikov dans un coin de la Sud de France Aréna de Montpellier, après le récital bleu et la victoire magistrale contre la Bulgarie (25-19, 25-21, 25-14).

Une heure et onze minutes seulement où le libéro de l’équipe de France a encore fait des kilomètres sur le terrain pour réceptionner les "missiles" bulgares et réaliser comme toujours des défenses qui font se lever le public et écœurent les adversaires.

"Il doit courir trois marathons sur un match d’une heure!" s’emballe Laurent Tillie. "Il soutient, défend, il est là pour déstabiliser les attaquants et les serveurs", rajoute le sélectionneur des bleus.

A 29 ans, ce fils d’un entraîneur russe longtemps en poste à Rennes, a dû, plus jeune, faire un choix fort pour devenir aujourd’hui la référence mondiale au poste de libéro.

"Lorsque j’avais 16 ans, mon père me faisait venir deux fois par semaine à l’entrainement avec les pros. Je me mettais libéro car je n’avais pas la hauteur et la puissance. Je prenais des parpaings. Mon père m’a demandé si mon rêve était de jouer en équipe de France comme libéro, je luis ai répondu oui."

Hockey-sur-glace et volley-ball

Un choix de carrière pas évident au départ. Jenia est, plus jeune, partagé entre le parquet et la glace. Le hockey fait partie de la culture russe et familiale. "D’ailleurs, je parle toujours russe à la maison avec mes parents pour ne pas oublier."

Sur la glace de la patinoire de Rennes, il y apprend à patiner et aime la discipline de ce sport physique où la vision du jeu est primordiale. "J’ai gagné beaucoup de vitesse et de puissance dans les jambes grâce au hockey, c’est pour cette raison que j’ai des appuis très bas. C’est un sport auquel j’étais vraiment attaché mais un jour mon père m’a demandé de choisir. Je me suis dit que j’avais plus de chance de percer dans le volley."

Un palmarès étoffé

Avec le club italien de Civitanova il est plusieurs fois élu meilleur libero de la Ligue des champions. En bleu, il devient champion d’Europe 2015 et deux fois vainqueurs de la Ligue mondiale (2015 et 2017). Presque à chaque fois, le titre de meilleur libero est une évidence.

"Il est dans les trois meilleurs liberos au monde, clame Benjamin Toniutti le capitaine des bleus. En défense, c’est clairement lui le meilleur. Il y a trois liberos qui sont très bons en ce moment: Pawel Zatorski avec la Pologne, Erik Shoji avec les USA et Jenia qui est vraiment énorme."

"Les liberos ne servent pas, il n’attaquent pas et ne bloquent pas. Sans faire tout ça, Jenia fait partie des liberos qui font la différence et qui te font gagner des matches. Pour moi c’est le meilleur libero du monde, souligne Earvin Ngapeth qui le surnomme affectueusement "l’Ouzbek" ou "Grebe".

Tout sauf un joueur de l’ombre

Avec son sourire permanent et sa bouille d’éternel bambin, il illumine d’enthousiasme l’équipe de France. Toujours prêt à plonger pour sauver un ballon, rapide et très agile dans les situation périlleuses, il a renversé ce poste ingrat en véritable spectacle. Il devient une pile électrique et un leader vocale de la défense. "On l’entend de loin. Il est partout. Quand on pense que la balle va tomber par terre, il est là pour la relever", ajoute Kevin Tillie, son compagnon de chambrée depuis des années.

La frustration de ne pas marquer de point est malgré tout toujours présente. "C’est un réceptionneur attaquant frustré", rigole Toniutti. "Cela me manque énormément de faire des points mais ça n’aurait pas pu marcher", rectifie celui qui ne porte jamais le même maillot que ses coéquipiers avant de conclure: "Je suis très bien là où je suis."

Nicolas Baillou