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Tour de France: à 100 jours du départ en Italie, Prudhomme promet une course "haletante"

A 100 jours du départ du Tour de France en Italie, Florence a fêté la Grande Boucle ce jeudi sous le soleil, entre tradition et sport. Des fanfares aux jeunes cyclistes, les Florentins ont hâte. Christian Prudhomme était bien sûr là. Le directeur du Tour de France a répondu aux questions de RMC Sport.

Après Copenhague en 2022 et Bilbao en 2023, quel bel accueil ici à Florence à 100 jours du départ du Tour de France...

Un très bel accueil à Florence dans l'une des plus belles villes du monde. C'est un musée à ciel ouvert, chacun le sait et chacun s'en rend compte dès lors qu'il pose les pieds ici. Et puis ce qui était aussi très sympa et très agréable pour les festivités de ces 100 jours, c'est de voir que les racines, les drapeaux, les traditions étaient là et des jeunes gamins à vélo avec un t-shirt jaune.

Ça va être un grand départ splendide évidemment, esthétique sans aucun doute, mais rude aussi. Les deux premiers jours pour les deux premières étapes du Tour en Italie seront faits pour des gens qui sont capables de bien grimper, à tout le moins des puncheurs.

Cette première étape entre Florence et Rimini promet beaucoup. On dit que ce sera la plus dure des premières étapes de l’histoire du Tour...

C'est une étape qui comptera mais de toute façon le Tour de France, c’est du premier au dernier jour. On ne peut pas nécessairement le gagner tous les jours, mais on peut le perdre à l'évidence tous les jours. Ce sera encore le cas. Il n’y avait pas de volonté particulière de Thierry Gouvenou (directeur technique du Tour) ou de moi-même de durcir le premier jour. Mais quand on va de Florence et qu'on passe par les Apennins, on n'a pas trop le choix. Ensuite on passe par Saint-Marin pour arriver sur l'Adriatique, c'est forcément une étape rude.

Sachant que le lendemain, il y a un choix très clair avec deux fois la cote de San Luca qui offre des pourcentages à 15-16% et qui sera franchie deux fois. Il y avait là une vraie volonté de retrouver les meilleurs du monde épaule contre épaule dans les derniers kilomètres de la course. Si on regarde le palmarès du Tour d'Émilie, on voit à chaque fois que ce sont les meilleurs puncheurs et les meilleurs du monde qui sont devant.

Ce sera aussi le Tour des légendes...

C’est la première fois que le Tour de France s'élance d'Italie. Le Tour a été créé en 1903, on est en 2024, c'est sa 111e édition et on va célébrer les 100 ans de la première victoire d'un coureur italien sur le Tour: Ottavio Bottecchia, en 1924. Nous aurions sans doute fait des étapes un peu plus courtes si nos amis italiens ne nous avaient dit à juste titre, très légitimement, "il faut parler de nos champions". Donc on part de Florence. C'est la ville de Gino Bartali, le seul coureur à avoir remporté le Tour à dix années d'intervalle avant et après la guerre (en 1938 et 1948), "Juste parmi les nations", pour ce qu'il a fait d'encore plus beau en dehors de sa carrière sportive pour passer des papiers et sauver des enfants juifs pendant la guerre.

On ira ensuite effectivement sur les routes de Gastone Nencini, le maillot jaune qui a serré la main du Général De Gaulle en 1960 à Colombey-les-Deux-Églises. Et ça tombe bien pour la première fois dans l'histoire du Tour, on va faire étape à Colombey-les-Deux-Églises. On ira ensuite chez Marco Pantani en ombre et lumière. Rimini où il est mort, Cesenatico où il est né et puis on sortira d'Italie par le pays de Fausto Coppi, le Campionissimo. On passera notamment par Tortonne où il est mort et on sortira par l’une des dernières ascensions du jour à Sestrières où il avait gagné en 1952, l'année où les arrivées en altitude avaient été inventées sur le Tour de France avec trois arrivées au Puy-de-Dôme, à l’Alpe d’Huez et à Sestrières. Coppi avait gagné les trois.

On va aussi célébrer de grands champions de notre temps: Pogacar, Vingegaard, Roglic et Evenepoel. Allons-nous vivre un Tour parmi les plus beaux de l’histoire ?

Ça on le dira après. Ce qui est certain, c'est que c'est un Tour qui donne envie avec quatre as dans quatre équipes différentes, ce qui n'était pas forcément évident à l'automne. On est très heureux de voir les quatre champions du moment des courses par étapes dans quatre formations différentes. Donc oui il y aura un affrontement, si ce n'est de tous les instants, en tout cas à l'évidence fréquent, en espérant les retrouver tous les quatre au départ sans chute évidemment ou sans pépins divers et variés. Mais oui il y a un terrain qui est fait pour ça, il y a des possibilités d'attaques de très loin. On sait que les champions d'aujourd'hui peuvent attaquer à peu près n’importe où, pas simplement dans les derniers kilomètres. Donc j'espère qu'on aura la course haletante que nous souhaitons tous.

Quand on voit leur début de saison, on se dit que c'est incroyable...

Oui oui oui (rires), bien sûr. Le parcours est fait pour ça, les champions sont là, voilà. Mais ne soyons pas gourmand trop tôt.

Pour revenir à ce départ en Italie, on célèbre quelque part l’amitié franco-italienne à travers ce grand départ…

Quand on va dans un pays on célèbre toujours une amitié de toute façon quoi qu'il en soit, ou un rapprochement. Le sport rapproche, le sport fédère, le sport rassemble et peut-être plus encore le cyclisme et le Tour de France par son itinérance. Donc bien sûr que oui, l'Italie et la France ont des racines communes. On est ici à Florence qui a été capitale d'un département français sous Napoléon, le département de l'Arno, le fleuve qui passe ici.

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Ce départ en Italie, le premier de l’histoire, a mis énormément de temps à arriver. Pour quelle raison?

Le Tour avait très envie de l'Italie, mais c'est une histoire qui a failli ne pas se faire puisque Florence était candidate en 2014 pour le centenaire de Gino Bartali. Et puis en mars 2012, Bradley Wiggins gagne Paris-Nice et puis en juin 2012, il gagne le Dauphiné puis le Tour de France. Il devient le premier Britannique vainqueur du Tour et nous avons été très marqué par la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Londres en mondovision avec la reine d'Angleterre Elizabeth II, James Bond et Bradley Wiggins, en tee-shirt jaune donnant le coup d'envoi des Jeux olympiques.

Là on s'est dit 'il faut partir du Royaume-Uni au plus près de la première victoire d'un Britannique dans le Tour'. Du coup nous ne sommes pas partis de Florence qu'on a relancé deux ans après mais ça n'a pas marché. À l'époque, le maire était Matteo Renzi, devenu président du conseil. Dario Nardella, son premier adjoint, est ensuite devenu maire et au début de la pandémie en mars 2020 il m'a envoyé un message, en me disant: 'Florence si belle est déserte, je n'ai pas oublié le rêve du grand départ, maintenant que je suis maire, je rêve que nous puissions concrétiser ce rêve.' Ça a été le début de la seconde aventure qui mène à ce grand départ de de Florence en 2024.

Propos recueillis par Arnaud Souque