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Droits TV de la Ligue 1: pourquoi la situation est toujours figée, à moins de six mois de la nouvelle saison

À cinq mois et demi du lancement de la saison de 2024-2025, les fans de foot ne savent toujours pas sur quelle chaîne ils pourront regarder les matchs de Ligue 1. Les négociations se poursuivent mais la situation semble figée entre les différents acteurs. Explications.

Le seul média qui a pour le moment mis de l’argent sur la table de la LFP, c’est DAZN. La plateforme britannique s’avance comme le nouvel entrant sur le marché des droits TV de la Ligue 1. Son offre se chiffre à 500 millions d’euros par an pour l’ensemble des matchs de chaque journée en exclusivité. Dans ses échanges avec les dirigeants de DAZN, la LFP pousserait pour qu’ils acceptent de maintenir ce prix mais pour moins de matchs, afin qu’un deuxième acteur vienne compléter l’offre globale. La Ligue, qui souhaiterait vraiment que DAZN devienne son nouveau partenaire de référence, argumente auprès de la plateforme en insistant sur le fait que ce serait le meilleur modèle pour réussir son implantation en France.

DAZN refuse de rehausser son offre… pour le moment

Face à cette demande, les dirigeants de DAZN se montrent circonspects et refusent pour le moment d’aller plus loin dans leur offre, même s’ils restent déterminés à se développer en France. Au sein du "Netflix du sport", on indique que c’est une société à la discipline financière forte et que seuls les montants en capacité d’être remboursés sont investis. Est-ce une stratégie de négociation ou une réalité économique qui les empêche de miser davantage? Ces questions restent en suspens, de quoi figer la situation alors que DAZN aimerait conclure dès que possible pour lancer son recrutement de collaborateurs, son offre commerciale et sa campagne de communication auprès du grand public.

La Une de Rothen s’enflamme : En pleine de négociations des droits TV, la Ligue 1 se remettrait-elle d’un départ de Mbappé ? – 25/01
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Mais un autre aspect du dossier agace au sein de la plateforme. "Quand les négos prennent une tournure trop politique, ce n’est jamais bon signe", confie un proche du dossier, qui fait référence à l’appui du pouvoir politique dont profite la LFP. Les images du dîner à l’Elysée du mardi 25 février, qui a réuni les dirigeants du foot français, de BeIn Sports autour des chefs d’Etat Emmanuel Macron et de l’émir du Qatar, ne sont pas passées inaperçues.

"Il y a beaucoup de fantasmes sur les interventions politiques sur ce dossier. Il y a des sujets tellement plus importants à gérer", tempère une source proche du pouvoir. Même si les droits TV n’ont pas été abordés lors de ce repas, de nombreux échanges se sont tenus les heures, jours et semaines précédents, la Ligue essayant de convaincre BeIN d’investir sur les quelques matchs en complément de l’offre de DAZN. Les discussions actuelles se basent sur un match en exclusivité et deux autres en co-diffusion.

BeIn Sports à la recherche de rentabilité

Problème: BeIN est quasiment à l’équilibre financier et un investissement conséquent sur les droits replongerait les comptes dans le rouge puisque ce n’était pas prévu dans le business plan. Le directeur général de la chaîne qatarie, Yousef Al-Obaidly, se montre donc, pour l’instant, plutôt réticent. Malgré tout, une réflexion est en cours et tout pourrait s’accélérer si l’état-major de la chaîne donnait son "go".

Nasser Al-Khelaifi, grand patron de BeIN, en contact permanent avec Vincent Labrune, le président de la Ligue, est bien conscient de la nécessité, pour la Ligue en général et le PSG en particulier, de maintenir des recettes importantes de droits TV. La difficulté de BeIN réside dans son lien très étroit avec Canal+, son distributeur exclusif via un contrat important de 250 millions par an. Logiquement, les dirigeants de BeIN estiment qu’en cas de nouveaux droits de L1 acquis, le contrat de distribution devra être réévalué. Mais la tendance du côté de Canal est de limiter au maximum cette réévaluation du contrat, surtout si cela permettrait de finaliser la négociation de la Ligue avec qui les relations restent très tendues. Mais difficile d’imaginer BeIN réaliser un investissement de plusieurs centaines de millions d’euros à perte sans garantie de contreparties aux services de ses intérêts.

Le levier qui pourrait faire avancer le dossier est peut-être celui des droits internationaux, également en négociation. La LFP a déjà vendu ses droits dans plus des deux tiers des territoires de la planète et devrait sensiblement augmenter ses revenus. Le territoire principal qui reste à négocier est l’Afrique, plus gros contributeur des droits internationaux. Aujourd’hui, les droits de la L1 sur ce continent sont détenus par Canal+ Afrique. Rien ne dit que la filiale de Canal les conservera. Les discussions sont intenses. Et le sort de Canal+ Afrique pourrait impacter la suite des négociations.

Chez Prime Vidéo, actuel diffuseur principal de la Ligue 1, les dirigeants maintiennent des contacts réguliers avec la Ligue. La plateforme TV d’Amazon attend de connaître l’identité du diffuseur principal avant de négocier avec ce dernier pour récupérer un match contre environ 80 à 100 millions. S’ils y parviennent, ils devraient proposer cette rencontre uniquement dans l’abonnement Prime, et non plus dans le Pass Ligue 1, qui disparaîtrait.

L’objectif de Vincent Labrune reste d’atteindre les 900 millions d’euros de revenus globaux (domestiques et internationaux). Malgré le statu quo actuel, la Ligue reste sereine et patiente.

Loïc Briley et Arthur Perrot