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Alerte au sein de la défense de l'équipe de France avant l'Euro: c’est quoi le problème?

Surprise par l’Allemagne (0-2) puis difficilement victorieuse du Chili (3-2), l’équipe de France n’a pas totalement rassuré à quelques mois de l’Euro 2024. Secteur le plus en difficulté, la défense tricolore même parfois inquiété, après avoir été la principale force des Bleus début 2023.

Gage de fiabilité et premier élément de la belle campagne de qualification à l’Euro 2024, la défense de l’équipe de France tire la langue ces derniers mois. Pendant le mois de mars, les Bleus ont encaissé quatre buts en deux matchs... soit presque autant que sur toute l’année 2023.

Un manque de solidité qui pourrait faire naître quelques doutes avant le tournoi continental disputé en Allemagne cet été (du 14 juin au 14 juillet) et où le groupe de Didier Deschamps aura fort à faire contre l’Autriche, les Pays-Bas et la Pologne. Après la leçon infligée par l’Allemagne (0-2), la France a peiné pour battre le Chili (3-2) au Vélodrome et n’a pas forcément rassuré dans le secteur défensif, avec deux buts probablement très évitables.

>> Revivez France-Chili (3-2)

Un souci de concentration?

Surpris d’entrée contre l’Allemagne avec une inspiration géniale de Florian Wirtz après sept secondes de jeu, les Bleus ne se sont jamais relevés. Face au Chili, Marcelino Nunez a encore profité de quelques largesses défensives (et d’un alignement pas vraiment impeccable de la charnière tricolore) pour tromper Mike Maignan. A écouter les premiers intéressés, le but chilien est surtout venu d’une belle frappe et… d’un manque de concentration dans les premières minutes.

"C’est l’entame de match, c’est la concentration. Sur les deux matchs, les cinq ou dix premières minutes, on n’est pas assez agressifs et on se fait tourner, a ainsi analysé William Saliba face à la presse. "Après on s’est bien réveillés et je pense que l’on a bien réagi. Mais c’est clair que les entames de match on doit mieux les prendre."

Un vrai déclin en termes de stats

Après une Coupe du monde réussie où les Bleus ont fait preuve d’efficacité malgré les huit buts encaissés en sept rencontres, l’équipe de France a lancé ses éliminatoires pour l’Euro avec cinq matchs sans céder défensivement. Mais depuis la défaite en Allemagne (2-1) au mois de septembre 2023, les partenaires du capitaine Kylian Mbappé n’ont signé qu’une seule clean sheet… lors du carton record face à Gibraltar (14-0). A l’exception de ce large succès contre l’une des pires sélections au monde, la France a toujours au moins pris un pion (dix au total) sur ses sept dernières sorties. De quoi frustrer certains d’entre eux.

"M’inquiéter non, mais ça m’agace, c’est vrai", a reconnu Ibrahima Konaté après la victoire poussive face au Chili à Marseille. "En tant que défenseur ça m’agace de prendre des buts, Là encore deux mais on espère qu’on va repartir sur la dynamique qu’on avait eu pendant les qualifications."

Une rotation qui nuit aux automatismes défensifs

Didier Deschamps s’est félicité d’avoir pu faire débuter 18 joueurs lors du rassemblement de mars. Soucieux de tester plusieurs joueurs et de possibles associations avant l’Euro, certains supporteurs regretteront les trop nombreux changements effectués par le sélectionneur et le manque de certitudes. Derrière, particulièrement, le technicien a multiplié les rotations. Et cela a probablement nuit aux récentes performances défensives des Bleus.

Entre l’Allemagne et le Chili, toute la défense a changé, et même le gardien. Pas l’idéal pour enchaîner et gagner en confiance collective. Dans les buts, les pépins à répétition de Mike Maignan l’ont régulièrement privé d’une titularisation et cela a encore été le cas face aux Allemands… comme contre la Grèce en septembre.

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Mais c’est en charnière que cette instabilité défensive s’est le plus faite sentir. Depuis la défaite en finale de la Coupe du monde 2022 et la retraite internationale de l’indiscutable Raphaël Varane, Didier Deschamps a cherché la bonne formule. Handicapé par les blessures de certains joueurs sur des rassemblement, le sélectionneur a aligné dix duos différents lors des douze matchs de la France depuis le Mondial au Qatar.

Si l’association entre Dayot Upamecano et Ibrahima Konaté semblait une réussite avec trois succès sans prendre de buts sur les quatre premières rencontres des qualifications, le Munichois et le central de Liverpool n’ont plus débuté ensemble depuis France-Grèce (1-0) en juin 2023. Pire, les Bleus ont changé de charnière lors des dix derniers matchs à la fois sur des innovations tactiques et sur des forfaits. Difficile, voire impossible, de créer des automatismes et une véritable assise défensive dans de telles conditions.

Les charnières utilisées par la France depuis le Mondial 2022:

· France-Pays Bas (4-0): Upamecano-Konaté

· Irlande-France (0-1): Upamecano-Konaté

· Gibraltar-France (0-3): Konaté-Fofana

· France-Grèce (1-0): Upamecano-Konaté

· France-Irlande (2-0): Lucas Hernandez-Upamecano

· Allemagne-France (2-1): Saliba-Todibo

· Pays Bas-France (1-2): Lucas Hernandez-Konaté

· France-Ecosse (4-1): Konaté-Pavard

· France-Gibraltar (14-0): Todibo-Upamecano

· Grèce-France (2-2): Lucas Hernandez-Saliba

· France-Allemagne (0-2): Upamecano-Pavard

· France-Chili (3-2): Saliba-Konaté

Une stratégie floue pour les latéraux?

Une fois réglé le problème de la charnière, avec un duo qu’il faudra installer durablement en vue de l’Euro, Didier Deschamps va aussi devoir décider de son plan de jeu pour les latéraux. Pour ce qui est des hommes, les quatre noms semblent actés même si des blessures peuvent encore changer la donne.

Le duo Koundé-Clauss parait désormais bénéficier des faveurs du staff à droite et dans le couloir gauche, les frères Hernandez se retrouvent en concurrence. Mais des deux côtés, ces choix illustrent aussi les problèmes défensifs tricolores. Plus offensif que son rival, Jonathan Clauss peut parfois laisser plus d’espaces dans son dos qu’un Jules Koundé, axial replacé au poste de latéral en sélection. Mais le Marseillais apporte plus dans le secteur offensif où sa qualifié de centre et ses débordements font du bien en soutien de l’ailier.

Sur l’autre côté du terrain, Lucas Hernandez a retrouvé la forme au PSG et sa blessure au genou semble appartenir au passé. Mais l’idée de parfois l’utiliser dans l’axe plutôt que le laisser se concentrer sur le poste de latéral gauche et à la concurrence avec son frère Théo. Là encore, comme pour le duo Koundé-Clauss, les deux frères possèdent des qualités différentes. Plus fiable défensivement, l’aîné a déjà montré de belles choses avec les Bleus depuis ses débuts en 2018. Mais là encore, son cadet peut apporter un vrai plus dans le secteur offensif.

Souvent brillant dans un schéma avec trois axiaux, Théo Hernandez peut ainsi de tout son poids en attaque avec sa qualité de frappe et ses centres. Problème, cela implique aussi quelques libertés offertes aux attaquants adverses. Le match contre le Chili résume bien les prestations de Théo Hernandez avec la France avec un boulevard dans son dos sur l’ouverture du score sud-américaine mais un caviar de centre déposé sur la tête de Randal Kolo Muani pour le but du deux à un.

D’ici l’Euro, Didier Deschamps va donc devoir trancher entre la possibilité d’avoir des latéraux offensifs pour apporter le surnombre ou au contraire de solidifier le secteur défensif avec des joueurs supposés plus fiable. Des choix qui pourraient aussi être directement liés au style de jeu que le sélectionneur voudra mettre en place pour la compétition estivale en Allemagne.

Jean-Guy Lebreton Journaliste RMC Sport